Malgré un neuvième trimestre consécutif de hausse de l’emploi privé en France au cours du premier trimestre 2023, la croissance économique est atone. Le jeudi 8 juin 2023, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) a publié ses chiffres concernant l’évolution de l’emploi salarié au cours du premier trimestre 2023. Voici comment ces chiffres peuvent être interprétés.
L’état de l’emploi en général
Le marché de l’emploi se porte plutôt bien. Au cours du premier trimestre 2023, les emplois créés dans le secteur privé ont dépassé de 87 000 ceux qui ont été détruits. Cela porte le nombre total d’emplois à plus de 21 millions, soit 1,2 million de plus que fin 2019, avant la pandémie de Covid.
Il convient de noter que le secteur public n’a pratiquement pas connu de changement, le nombre d’emplois étant passé de 5,86 à 5,92 millions au cours des quatre dernières années. Il y a même eu des signes plus encourageants, comme la création de nouveaux emplois dans le secteur tertiaire, qui est responsable de la plupart des nouveaux emplois créés dans le secteur privé.
Cela contraste avec le secteur manufacturier, qui a enregistré une légère diminution du nombre d’emplois. Dans l’ensemble, le marché de l’emploi semble assez solide, le nombre total d’emplois ayant augmenté de 1,2 million au cours des trois dernières années.
Envolée de l’emploi dans le privé
Ce phénomène laisse encore les experts perplexes. « Nous sommes surpris tous les trimestres », déclare Mathieu Plane de l’OFCE. En effet, la croissance économique ne se présente pas sous les meilleurs auspices. Au premier trimestre, elle n’a progressé que d’un maigre 0,2 %. C’est deux fois moins que le taux de croissance de l’emploi privé.
Cela amène l’économiste à conclure qu’il y a plus de création d’emplois que de création de richesses. Cela signifie que la productivité diminue, c’est-à-dire la richesse créée pour un emploi donné ou une heure travaillée. Cela indique que les entreprises ne sont pas en mesure de générer autant de richesses qu’elles créent d’emplois. Cela pourrait potentiellement conduire à une crise économique à l’avenir, où il y a trop de travailleurs et pas assez de richesses pour les soutenir.
Baisse de productivité dans les entreprises
Depuis 15 ans, ce phénomène est observé dans tous les pays développés, selon Anne-Sophie Alsif, économiste en chef chez BDO. Ce phénomène s’explique par la numérisation. Bien sûr, la création d’un logiciel ajoute de la valeur, mais elle ne remplace pas forcément les achats physiques par des achats en ligne.
La tertiarisation de l’économie joue également un rôle. Les emplois de service produisent moins de valeur ajoutée que l’industrie. Au premier trimestre, les services (transports, restauration, etc.) ont créé 70 000 emplois, alors que l’industrie n’en a créé que 8 000. Et encore, ce chiffre ne tient pas compte de l’intérim, qui a connu une baisse de 18 000 emplois après deux trimestres de croissance.
Serait-ce le signe d’un retournement de tendance ? Cette tertiarisation et la numérisation ont entraîné une demande accrue de services immatériels, tels que le conseil, le marketing ou l’informatique. Cela a provoqué une augmentation du nombre d’emplois dans le secteur des services, alors que le nombre d’emplois dans le secteur industriel a diminué.
En outre, la numérisation de l’économie a permis aux entreprises d’automatiser plus facilement les tâches et les processus, ce qui a entraîné une diminution du nombre d’emplois dans le secteur industriel. Par conséquent, la valeur ajoutée par emploi a diminué, entraînant une baisse de la croissance du PIB.